« La disperazione è una forma superiore di critica. Per ora, noi la chiameremo “felicità”... »
Textes & musiques : Léo Ferré
Traductions : Enrico Medail (pistes 1 à 9, 12 à 16)
Arrangements et direction musicale : Jean-Michel Defaye (pistes 2, 3, 5, 6, 9-11, 14, 15, 16), Léo Ferré (pistes 7, 8, 12, 13)
Arrangements : Zoo (piste 1), Léo Ferré & Zoo (pistes 4, 17, 18)
Prise de son : Gerhard Lehner (pistes 2, 3, 5, 6, 9), Claude Achallé (pistes 1, 4, 7, 8, 17, 18)
Supervisation : Richard Marsan
Crédits visuels : Geneviève Vanhaecke (recto), Serge Arnoux (dessin verso), Claudio Bonivento (dessin rabat intérieur)
Texte de présentation (édition originale) : Giovanni Testori
Enregistré le 4 mars 1969 (pistes 10, 11), les 22 & 23 juin 1970 (pistes 14 à 16), les 15, 16 mai et le 15 juin 1972 (pistes 1 à 9, 17, 18), le 14 juin 1973 (pistes 12, 13) aux Studios Barclay, Paris (France).
Publié en 1969 (pistes 10, 11), en 1972 (pistes 1 à 9, 17) en 1973 (pistes 12, 13), en 2013 (pistes 14 à 16, 18) par Barclay et Barclay-Universal.
1.
I Pop (Les Pop)
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2.
Piccina (Petite)
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3.
Pepee (Pépée)
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4.
La Solitudine (La Solitude)
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5.
Niente piu (C'est extra)
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6.
Gli Anarchici (Les Anarchistes)
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7.
Il tuo stile (Ton style)
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8.
Tu non dici mai niente (Tu ne dis jamais rien)
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9.
Col tempo (Avec le temps)
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10.
Verrà la morte
bonus
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11.
L'Uomo solo
bonus
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13.
Alla scuola della poesia (Préface)
bonus
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15.
I Poeti (Les Poètes)
bonus
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16.
La Notte (La Nuit)
bonus
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17.
La Solitudine (variazioni)
bonus
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Cet album et ses titres bonus ne sont disponibles à l'achat que dans le coffret La Solitude : intégrale 1968-1974.
En 1969, Léo Ferré décide de mettre les bouts et d'émigrer sine die en Italie avec sa nouvelle compagne Marie-Christine et leur enfant à naître, histoire d'échapper au tintamarre franco-français et accessoirement au rayon de nuisance de madame ex, toxique jusqu'au bout. Le couple s'installe dans la campagne toscane, entre Florence et Sienne, terre bénie de Dante. À cette époque la culture musicale française ne s'est pas oblitérée dans l'oïkophobie, en conséquence de quoi celle-ci rayonne encore et les chanteurs français s'exportent ; Brel et Brassens sont spontanément traduits et adaptés par des artistes italiens francophiles. Ferré ? Niente. C'était dans l'ordre naturel des choses, pour quelqu'un parlant couramment cette langue et dont les ascendants viennent du cru, que de vouloir se faire connaître des habitants de sa patrie d'adoption. Avanti Léo !
L'acte inaugural du Ferré italien a lieu en mai 1969, au Piccolo Teatro di Milano, petit théâtre créé après-guerre, qu'anime énergiquement Giovanni Testori, écrivain catholique, dramaturge, poète, critique littéraire et figure transgressive de la vie culturelle milanaise, grand amateur de l'œuvre de Léo. À cette occasion, Ferré chante en langue vernaculaire L’Uomo solo et Verra la morte, deux poèmes de Cesare Pavese enregistrés en mars de cette même année à Paris et publiés sur un 45 tours, dans l'idée de « tester » le marché italien. Le chanteur Enrico Médail se manifeste alors, qui fait connaître son désir de traduire les chansons de Ferré. Son travail d'adaptation — sa sensibilité l'a amené à privilégier la musicalité au sens littéral — plaît à Léo, qui décide d'en enregistrer trois manifestations en juin 1970 : É la fine (C'est extra, dont la traduction sera retravaillée ultérieurement), I Poeti (Les Poètes) et La Notte (La Nuit). Pour une raison qui nous échappe cette convaincante mise en bouche va rester à la cave durant quarante ans.
À la mi-avril 1972, Léo invite Enrico Médail chez lui, à Castellina in Chianti, pour lui proposer une collaboration en bonne et due forme ; Barclay a donné son feu vert pour tout un album italien. Ensemble, les deux hommes arrêtent une liste de neuf titres issus des trois derniers albums, en mettant l'accent sur le dernier en date. Médail les traduit très rapidement et Ferré les enregistre le mois d'après sur les play-back orchestre existants. Le ci-devant Testori, d'abord sceptique sur la pertinence d'une telle entreprise, puis totalement conquis, servira d'ambassadeur à ce disque. La Solitudine n'en fera pas moins ce qu'il est convenu d'appeler un bide.
Léo ne désarme pas. En juin 1973, poussé par son directeur artistique Richard Marsan, l'artiste enregistre un nouveau « single », qu'il décline dans la foulée en italien : T'amavo tanto sai (Je t'aimais bien, tu sais). Sa face B, Alla scuola della poesia (Préface), est très vraisemblablement prélevée aux sessions fantômes de Non c'é piu niente, clone italien de l'album Il n'y a plus rien dont la trace aujourd'hui est perdue.
Enfin rassemblé, ce corpus nous permet de redécouvrir la passion et le panache des interprétations de Léo, très à l'aise dans cette langue étrangère qui lui va si bien ; un peu comme s'il s'était mis un point d'honneur à se surpasser vocalement, pour mieux terrasser toute réticence, et pour la joie. D'autres textes seront travaillés par Médail, un nouvel album envisagé. Mais rien ne se passera comme prévu et d'autres choix seront faits. La vie, décidément, est un slalom.
Alaric Perrolier – 2022