« Il est grand temps de rallumer les étoiles », disait Guillaume Apollinaire (dont on fête ces temps-ci le
centenaire, soit dit en passant). Alors nous on a fait comme Guillaume il a dit...
Aujourd'hui moins connues et moins courues que
les retentissantes années 60-70 passées sur le porte-avion Barclay, les années 40 et 50 de Léo Ferré sont pourtant essentielles, qui voient l'artiste sortir de terre, éprouver ses forces, explorer sa multi-potentialité. C'est une période pleine de bifurcations passionnantes entre œuvres lyriques et symphoniques, rengaines populaires et poésie chantée, où l'artiste fertilise la vaste lande de son œuvre-monde, affermissant les racines de ses accroissements ultérieurs.
Or, depuis « l'intégrale » Les Années Odéon publiée par Sony en 1993, le corpus enregistré par Léo entre 1953 et 1958 ne s'était pas retrouvé de nouveau proposé au public en un seul tenant avant... 2016 et le coffret Monsieur mon passé (1950-1960), paru chez Chant du monde sous la houlette d'Alain Raemackers pour marquer le coup du centenaire de la naissance de Léo Ferré, alors même que nous loupions le coche. Ledit coffret rassemblait pour la première fois les enregistrements officiels réalisés pour Le Chant du monde (1950-1954) et ceux de la période Odéon, désormais tombés dans le Domaine public et donc libres de droits. Il faisait tenir plus de 160 titres sur neuf disques, aboutissant à des durées d'écoute parfois proches des 80 minutes par disque, expérience assez éloignée de celle initialement proposée par les albums originaux de Ferré, aux enchaînements chamboulés. Il écartait en outre titres rares et inédits parus depuis la fin des années 1990.
Rallumant le flambeau de « la The Intégrale », première tentative contrariée de réédition des disques LCDM-Odéon par les éditions La Mémoire et la Mer entre 2004 et 2008,
La Vie moderne (1944-1959) vient couronner ces efforts successifs et plusieurs années de réflexion sur la meilleure manière de présenter l'œuvre de Léo Ferré. Ce que nous vous proposons aujourd'hui est le coffret ultime dont nous rêvions : 14 disques (200 titres et quelques !) pour 15 années de création (1944-1959)
surprenantes par leur diversité. Tout y est :
- les premiers 78 tours de 1950
- les neufs albums originaux parus entre 1953 et 1958, avec – pour la première fois depuis leur parution originelle ! – la reproduction à l'identique de leurs pochettes pour agrémenter le voyage et le retour aux couplages originaux (ne sont-ils pas l'expression de la volonté discursive de l'artiste après tout ?!)
- les 45 tours non repris sur album
- 56 titres rares parmi lesquels les enregistrements réalisés à RMC avant que Léo ne « monte » à Paris en
1946, les passages dans les studios de la radiodiffusion française entre 1947 et
1959 (dont De sacs et de cordes in extenso), mais aussi parmi lesquels la Symphonie interrompue, des extraits de la bande originale du documentaire Les Hommes de la nuit, et 18 titres ou versions totalement inédits à ce jour !
Jamais on n'est remonté aussi loin dans la trajectoire de la comète ferréenne, jamais on
n'a été aussi exhaustif sur cette période fondatrice et ouverte (rien n'était encore décidé), jamais celle-ci
n'a été aussi finement exposée dans son déroulé...
Alors bien sûr il est toujours présomptueux de parler d'édition « définitive », car des enregistrements inconnus ou considérés comme perdus aujourd'hui peuvent toujours resurgir de façon inattendue, mais enfin l'idée est là : le premier tiers de l'œuvre de Léo trouve ici son plus bel écrin.
Pour tout amoureux de Léo Ferré et pour tous les curieux désireux
de prendre le fleuve à la source, de découvrir dans de bonnes conditions le cheminement de cet artiste parfois jugé intimidant mais ô combien gratifiant, il va sans dire qu'il serait dommage de passer à côté. L'unité fondamentale de l'œuvre enregistré complet commence désormais ici.
Car ce n'est qu'un
début...
Alaric
Équipe LMELM
PS : tous ces enregistrements officiels étant tombés dans le Domaine public,
c'est-à-dire à la merci des marchands de tapis qui rééditent tout et
n'importe quoi n'importe comment – je veux dire : sans effort de mise en
forme éditoriale, sonore et visuelle particulière – dans l'espoir de
faire du bif avec (les pauvres, s'ils savaient...!), nous n'avions pas
d'autres choix que d'inclure les concerts historiques à l'Olympia
(1955) et à Bobino (1958). Bien qu'ils contreviennent à notre logique
d'intégrale « studio », il nous faut faire bloc contre la prolifération
et l'éparpillement des publications Léo Ferré bas-de-gamme proposées par
ces pignoufs, que les « lafarfouillettes » du streaming et du
téléchargement accueillent sans émettre d'objections quant à la qualité
d'ailleurs (mais passons). Avec LMELM, vous avez un gage d'authenticité,
inscrit dans notre souci de
respecter l'œuvre originale, qu'accompagne une clarté de vue sur ce dont
on parle. Ce n'est pas rien.
PPS : certaines interprétations en public captée par la radiodiffusion française n'ont pas été incluses dans le coffret, par principe éditorial, par manque de place et par volonté de ne pas rendre l'objet prohibitif. Pour ce qui est de la période présentement couverte, nous rendrons ces enregistrements
live progressivement disponibles au téléchargement sur le site, à commencer par le
passage de Léo Ferré au cabaret Le Trou en 1950. N'hésitez pas à vous inscrire à notre lettre d'information pour être avertis des futures publications de ce type.
PPPS : un grand merci au dénicheur Daniel Dalla Guarda, à qui vous devez
d'entendre Léo-le-crooner chanter accompagné de Stéphane Grapelli sur J'ai tant rêvé.